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lundi 9 décembre 2013

UNE ENIGME PSYCHOLOGIQUE AU XVIIIe siècle


LA FRANCE MECONNUE :

Charles-Jérémie Ferment, duc de Luctuaille (1771-1790)
dit "le Fou Jactant"

Un mystère de la science du langage :

Hors  son cri de naissance, et des babillements incompréhensibles jusqu'à ses trois ans, il n'émit pas un seul mot intelligible jusqu'à  l'age de 16 ans... du reste, de 5 à 16 ans son silence fut quasi total (sauf quelques grognements lorsqu'il lui arrivait de trébucher et des glougloutements lorsqu'il avalait sa soupe).

Maints examens par les médecins les plus réputés de France ne purent que conclure à l'absence de cause physiologique à ce mutisme. Par contre, il semblait comprendre les prescriptions essentielles de la vie en bonne société et put se vêtir, manger, et se comporter a peu prés normalement.. mais cet individu invariablement silencieux inquiétait, et faisait l'objet d'une surveillance par trois domestiques.

L'entourage et les nombreux visiteurs de marque de cette famille "bien née" se gaussa bientôt de cet encombrant parent, qu'on cachait presque bien qu'on lui dût les honneurs ; on exigea un total respect de la part des domestiques : cependant on ne put empêcher qu'il ne fut bientôt désigné sous cape du surnom rien moins qu'affectueux de "Prince NeuNeu".

Jusqu'au jour (25 avril 1787) ou, à l'occasion d'une visite au Jardin des Plantes de Paris, en compagnie de ses deux frères titrés et d'autres enfants de la noblesse, il vit l'éléphant, et de sa bouche sortit ce mot "Immense!".
Grand étonnement de tous, on crut au prodige, on rapporta bien vite le fait.
L'interessé resta silencieux les jours suivants, mais on chargea un médecin de le surveiller jour et nuit.

Le médecin nota le caractère incroyablement progressif, et même d'une régularité mathématique, de ces progrès :
1ère semaine :  1 mot (le mercredi à midi) : "Applaudissement"" ; et en effet, il fut applaudi, la guérison semblait possible..
2ème semaine : 2 mots (le mercredi à 10 h et à 15 h) "Prudence"  et  "Manigance"
3e semaine : 4 mots (le mardi à 10 h et le jeudi à 10 h) "Force", "Cruauté", "Salissure" et "Escalier"
4e semaine : 16 mots (4 le lundi, 4 le mercredi, 4 le samedi, 4 le dimanche)
5e semaine : 304 mots (dont "Philosophie", "Antiquité", "Message" et "Apothéose"...
6 e semaine : 92 416 mots
7e semaine : 8 540 717 056 ...
autant dire un flot ininterrompu.....avec un débit de plus en plus très accéléré !!! le médecin usa deux cent quarante crayons... et garda pour longtemps une affreuse douleur au poignet droit. c'est en effet de 50 837 601 mots par heure qu'il s'agissait... il compta les 3 premières heures, et fit la déduction du reste..

On se perdit en conjectures, on échafauda mille théories, on invoqua même l'intervention divine, on fit bénir l'enfant prodige par le curé de la paroisse. De nos jours, on aurait peut-être rapproché ce phénomène de celui qui caractérise les autistes savants.

Malgré toute l'affection et la patience de ses proches, à partir de la 7e semaine cette loghorrée verbale continue de jour comme de nuit, commença à épuiser l'entourage... d'autant plus, que ces phrases n'avaient aucun rapport avec la vie quotidienne, cela s'apparentait à de la récitation d'interminables discours politico-culturo-philosophiques...

Un extrait noté par le médecin entre mille autres notamment   : ...."blablabla... ce serait se départir de la plus élémentaire sagesse que d'encourager les littérateurs tenants de la réciprocité sociale à faire publier leurs inepties si inconvenantes, inconsistantes et inconséquemment désorganisatrices du corpus traditionnel légué par des siècles d'intelligence nobiliaire et d'harmonie monarchique, choses bien respectables combinées comme de juste et tout bien considéré et en toute bonne foi à une progression des patrimoines et des cultures livresques, n'est ce pas là une peste de l'époque que de vouloir ainsi reconsidérer bien légèrement et sans véritable recul  les moindres règles et lois en niant leur pertinence et en soumettant ...blablablabla"

Chose plus curieuse encore, tous les trois cent mots, surgissait une obscénité ou du moins une impolitesse grave, parmi lesquelles le médecin releva quelques termes récurrents : "Pouffiasse", "Porc", "Crevure", "Chiasse"...prononcés bien plus fortement que le reste du flot verbal.

Entendre cela mille fois par jour devait être bien dur aux chastes oreilles de Mesdames la duchesse et de ses deux  filles récemment revenues des couvents, qui en conçurent de plus d'affreuses migraines. Par convenance, on n'invita plus les membres du clergé local. Las, l'espoir de beaux mariages s'évanouit, les prétendants les plus fortunés ne renouvelant pas leurs visites...

Madame Mère ne voulut s'éloigner de son enfant, et s'épuisa à l'entendre... elle s'enfonça bientôt dans une mélancolie d'impuissance à comprendre et soigner ce fils, s'alita, une mauvaise grippe emporta cet organisme affaibli..

De "Prince Neu-Neu", on finit par le surnommer "Prince j'N'eu n'en peut  plus" ou "le Fou Jactant".. d'aucuns lui reprochèrent à demi-mot le dépérissement puis la mort de sa mère.

Comme on ne voulait pas le faire enfermer - c'eut été déroger qu' admettre être parent d'un fou interné- on le laissa aller à sa guise dans le château et ses dépendances , domaine dont du reste il ne sortit plus jamais. Les visiteurs de marque, au début amusés, se lassèrent, ainsi que les gazetiers locaux...

Le reste de la famille, excédée et, le vernis craquant, laissant parfois échapper des "ta gueule!",  finit par se décider à isoler le discoureur en faisant doubler les cloisons de sa chambre, pour au moins étouffer une partie de la journée sa voix de stentor ; ce parleur incessant n'exerça cependant pas longtemps son prodige.. en effet, les mouvements ininterrompus jour et nuit de sa mâchoire, interdisant un véritable sommeil - il ne s'assoupissait que trois heures par nuit et hors cela il ne s'arrêtait de parler que pour manger 2 fois dix minutes par jour à midi et à dix-huit heures , réglé comme une horloge humain - lui causèrent une si grande fatigue qu'il dépérit rapidement, et s'éteignit finalement au bout de trois ans.


Cette histoire paraît incroyable? la preuve par l'image :

Ce croquis est extrait des notes du médecin :




plus sérieusement :
quelques informations sur le phénomène du "syndrome du savant"


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