Fils de bonne famille, sans talent particulier, et même réputé gauche et peu intelligent dans sa propre famille, et décrit comme méprisant et peu amène avec ses proches et serviteurs, il deviendra pourtant l'un des proches de Louis XVI dans sa vie quotidienne à Versailles avant la Révolution.
En effet, la famille de Trumelle obtient, en octobre 1788, après 40 ans de démarches, le bénéfice d'un office à Versailles : ah pas l'office le plus prestigieux certes, mais créé en lien avec une passion du nouveau roi Louis XVI : la mécanique et en particulier la serrurerie.
Ainsi fut créé en 1787 un nouvel office : "Gardien-Préparateur du tablier de L'atelier de serrurerie du Roi".
Il s'agissait en fait de faire ouvrir l'atelier en présence du Roi, de lui présenter le tablier de travail, et de le nouer, de rester le temps souhaité dans l'atelier - sans intervenir cependant dans les manipulations techniques - et de s'ébahir d'admiration à chacun des gestes techniques du Monarque.
Son nom n'a pas été retenu par les grands mémorialistes du règne, pourtant, il eut son quart d'heure de célébrité (disons plus jutement la minute et demi..).
Un jour que Louis XVI pratiquait la serrurerie et procédait à des vérificications sur un nouveau mécanisme, il se coinça l'auriculaire dans un trou de serrure; le "pauvre homme" (comme l'appelait en public la Reine devant des courtisanes) n'arrivait pas à dégager son petit doigt ; les garçons-serruriers n'osaient intervenir, bien que le Roi dût laisser échapper quelques soupirs de souffrance...
Joachim, qui se tenait jusque là sagement immobile à deux mètres du monarque, s'approcha :
- Sire, vous êtes géné me semble t'il...
- Oui mon bon , mais devant les serviteurs n'en parlez point, je serais ridicule... déjà que la Cour ne manque la moindre occasion de me railler...encouragé en cela par la Reine...
- Sire, comment puis-je vous aider..?
- Savonnez discrètement mon doigt et le mécanisme avec de la graisse...et faites éloigner les ouvriers, qu'ils ne soient point témoins de ma faiblesse.
Joachim, d'un ton et d'un geste de la main méprisants, demanda aux serruriers de s'éloigner ..
il prit ensuite un pot de graisse et enduit comme il put le doigt du monarque, qui tourna et put se dégager...
il essuya le doigt du roi...et ne trouvant pas de mouchoir, le fit avec ses propres manches en dentelle... !
Ceci finit, Louis le remercia et lui dit "N'en parlez point ; la Reine, qui trouve fort peu royal mon intérêt pour la mécanique, ne manquerai de m'inviter à fermer cet atelier..J'ai déjà suffisamment de chicaneries de toutes sortes à régler, point n'en rajoutez ...je loue par avance votre discrétion ".
Trumelle se tut donc ; il vit sa pension considérablement augmenter dès le mois suivant : Son père, dont la propre pension venait d'être, comme pour beaucoup, révisée à la baisse, lui demandant la raison de cette augmentation subite, pour une prise d'office aussi récente , Joachim en tête de linotte ne put s'empêcher de raconter l'affaire, dont la teneur se répandit, et fit bien rire dans les cercles de la Reine. Un auteur osa même dire dans un salon :
"Gros Louis n'est pas même capable de maîtriser sa propre mécanique, comment ferait-il bien fonctionner celle de la France !!! Nous voilà bien avec un tel serrurier, les portes de la prospérité ne sont pas prêtes de s'ouvrir !"
Le manquement à ce devoir de discrétion vint au oreilles de Louis XVI, qui, après quelques temps, agacé par ces moqueries étouffées, résolut de résilier l'office confié à un ingrat et de donner son congé à Trumelle à partir du 1er novembre 1789 (ceci par égard par la famille TRUMELLE, car à la 1ère date anniversaire de l'entrée dans l'office ; avant, c'eut été exposer l'honneur de cette famille... ).... mais les journées revolutionnaires d"octobre firent que Louis XVI fut contraint à quitter Versailles avant ce délai.
Pour vous faire une idée du personnage, ci-dessous un croquis : le tableau ne fut jamais achevé, avec les troubles révolutionnaires le peintre devant déménager... après 1790 l'exil , la vente du domaine familial et la misère de la vie d'émigé ne permirent plus au personnage (qui vécut jusqu'en 1838) de dilapider ses maigres ressources dans un portrait !
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